mercredi 18 avril 2012

Chapel Hill, la somme de ses influences

Nathan Symes, chanteur, compositeur et guitariste de Chapel Hill, groupe de folk-rock americana qu'il a créé en 2005, revient pour nous sur ses influences et ses racines américaines, à l'heure de la préparation de son nouvel album, le troisième pour cette formation où l'on retrouve Rym Boos au violon, Gregory Pernet à la contrebasse et Yves Maillé à la batterie. Un troisième opus qu'il présentera notamment lors du festival Strasbourg-Chicago, et une belle occasion pour lui d'échanger à nouveau avec des musiciens de son pays d'origine. 



Le nom de votre groupe, Chapel Hill, fait référence à votre ville natale, en Caroline du Nord. Pourquoi ce choix, alors que vous n'y avez vécu très peu de temps ?
Oui, j'y suis né, mais mes parents, qui étaient étudiants à l'Université de Chapel Hill, ont quitté cette ville quand j'avais un an. Comme je ne la connais pas, je peux l'imaginer comme je le veux. Le nom en lui-même est aussi assez poétique : la chapelle de la colline. Par rapport à notre style de musique, c’est un endroit important. Chapel Hill se situe au pied des Appalaches, beaucoup de groupes de folk américaine sont issus de cette région.

Parlez-nous de votre parcours musical ?
Je suis autodidacte. Quand j'étais à la fac, j'ai eu besoin de comprendre un peu mieux ce qu'était la musique au niveau théorique, donc j'ai pris quelques cours de théorie. Mais je suis complètement autodidacte à la guitare, je n'ai jamais pris de cours. J'ai commencé la musique en semi-pro quand j'avais la vingtaine, quand j'ai déménagé à Boston pour entrer dans l'école de musique de Berklee. J'ai fait un trimestre là-bas, mais ça ne me correspondait pas vraiment. C'était trop jazz, et les références pop et variété n'étaient pas les miennes. C'était au début des années 90, à l'explosion du mouvement grunge, dont je faisais partie en quelque sorte. Et le grunge était dénigré à Berklee, ce n'était pas de la musique savante, c'était trop proche de la musique punk. J'ai trouvé que je n'avais pas ma place dans cette école. J'aurais probablement mieux fait de faire une école d'art. Finalement j'ai fait ingénieur en électricité ! Je n'ai jamais travaillé en temps qu'ingénieur, mais j'ai eu le diplôme, avec mention bien !


Au cours de votre vie, vous avez fait plusieurs aller-retour entre les Etats-Unis et la France, dans quelle mesure ont-ils enrichis vos compositions ? Qu'est-ce qui est de l'ordre de l'apport français et de l'apport américain ?
L'esthétique de ma musique est très américaine. Je crois qu’on est toujours la somme de ses influences. Je suis arrivé en France quand j’avais 5, 6 ans. J’ai passé une dizaine d’année ici. J’ai découvert Jacques Brel à cette époque, ce qui a laissé des traces, surtout dans la manière d'interpréter les chansons. Ce qui m’avait vraiment marqué chez lui, c’était le côté très entier, très impliqué dans ce qu’il chantait quand il était sur scène. C'est quelque chose que j'essaie d'émuler. Je pense qu’il s’agit d’une de mes plus grandes influences pour l'interprétation. Mes deux parents sont américains, à la maison on écoutait plutôt Bob Dylan, du rock anglo-saxon des années 60, 70. Je suis imprégné de toute cette musique là. L’anglais est ma langue maternelle, j’ai donc un peu plus de mal à écrire en français, même si je commence à me demander si je ne vais pas m'y atteler.

Au niveau de la musique, les musiciens avec qui je travaille m’inspirent également. La violoniste est issue du classique, le batteur a fait le conservatoire, le contrebassiste et moi sommes autodidactes, et nous venons donc plutôt du rock. J'avais 20 ans dans les années 90, à l'époque du grunge, je pense qu'il en reste quelque chose. Ça donne donc un petit mélange qui est assez intéressant, avec des arrangements teintés de classique, la présence d’une influence rock et peut-être même aussi un peu de musique maghrébine, puisque Rym est en partie d'origine tunisienne.

Vos chansons semblent construites comme des scénarios de cinéma...
Je suis un grand fan de cinéma, et notamment de cinéma indépendant américain : Lynch, Jarmusch, Eastwood... Dans ces films-là il y a beaucoup de musique. J'aime bien aussi de côté kitsch des B.O. de westerns spaghetti d'Ennio Morricone.

Parlez-nous de votre nouvel album en préparation, en quoi est-il différent des deux premiers ?
Le premier album était très torturé, comme la plupart des premiers albums. Je n'avais jamais fait d'album complet avant. Surtout que j'ai fait cet album à plus de 35 ans, alors que j'ai commencé la musique à 20 ans, j'ai mis plus de 15 ans à faire un premier album ! Il y a beaucoup de choses sombres, et l'esthétique de la folk inclut pas mal d'histoires de meurtres ou de faits divers que j'ai repris. Le second était plus léger, plus lumineux. Il était quasiment prêt avant que le premier album soit enregistré !

Pour le troisième c'était un peu plus difficile, il fallait écrire le répertoire. Et on voulait qu'il soit plus moderne, plus produit. Il sera résolument plus rock, plus blues. On a passé beaucoup plus de temps à réfléchir aux arrangements, à une production un peu plus moderne, avec plus d'effets. Contrairement au précédent qui a été enregistré quasiment en live dans le studio. Il y a plusieurs pistes de violons, on a quelques guests : un accordéoniste, une violoncelliste, plus de chœurs. Les compos sont plus rock, plus énergiques. Cet album est finalement plus empreint de notre expérience du live. On est un groupe qui prend vraiment tout son sens sur scène. On a vu ce qui marchait avec le public et on essaie de reproduire ça sur le disque.


En tant que groupe franco-américain, Chapel Hill sera le trait d'union entre les groupes de Chicago et ceux de Strasbourg, comment définiriez-vous ce lien ?
J'ai beaucoup écouté ce que font les autres groupes, je trouve qu'il y a une cohérence au niveau du style, ce sont des groupes qui sont aussi très inspirés de la folk américaine, on est sur la même planète. Le trait d'union ce sera donc la folk, même si aucun des groupes n'est vraiment puriste. On rajoute tous des petites choses à cette folk américaine, il y aura donc des découvertes dans chaque groupe, y compris chez les groupes strasbourgeois.

Qu’attendez-vous du festival Strasbourg-Chicago ? Qu'est-ce qui vous a donné envie d'y participer ?
D'une part, c'est un projet que je trouve intéressant et assez audacieux, c'est chouette de faire un échange entre deux villes, surtout qu'il y a une scène folk assez importante à Strasbourg. Je connais Chicago, c'est une ville que j'aime beaucoup aussi. J'ai hâte de rencontrer les musiciens, et de travailler avec eux pour le concert choral de la Laiterie. Ça fait longtemps que je n'ai pas côtoyé de musiciens américains, j'ai envie de voir ce qu'ils pensent de notre musique. Pour l'instant on s'est toujours frotté principalement au public européen, et ce sera intéressant de voir ce qu'ils pensent de notre projet. L'éventualité d'aller à Chicago l'année prochaine me plaît beaucoup, j'ai encore jamais joué aux États-Unis avec le projet Chapel Hill, donc j'ai vraiment hâte de le faire.

Interview réalisée par Audrey, Caroline, Mélanie et Stéphanie pour le festival Strasbourg-Chicago

Retrouvez Chapel Hill en concert le 27 mai 2012 à l'Unabhängiges Medienfestival de Tübingen (Allemagne),  le 29 mai avec Amy Saraiya lors du concert d'ouverture du festival Strasbourg-Chicago au Café des Anges à Strasbourg, le 1er juin à la Laiterie lors du concert chorale de cloture. 

Digitives

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